INDUSTRIE - Les grandes industries

INDUSTRIE - Les grandes industries
INDUSTRIE - Les grandes industries

Une double évolution capitale caractérise, pour l’essentiel, l’industrie mondiale depuis quelques années, d’ordre économique et d’ordre géographique: sur le plan économique, elle concerne, d’une part, le volume de production et le niveau de productivité, avec des conséquences importantes sur l’emploi; sur le plan géographique, elle se marque par une tendance accrue à l’expansion de l’industrie dans des pays jusqu’alors peu industrialisés ou même dépourvus d’industrie, et par le développement préférentiel de nouvelles localisations des établissements industriels, en particulier les localisations portuaires.

L’évolution économique récente de l’industrie

La production

Jusqu’en 1974, la progression de la production industrielle mondiale a été notable et, dans certains cas, rapide, mais avec des taux variables suivant les industries et les pays industrialisés: pour ne retenir que les données de la décennie de 1970 et en utilisant les productions industrielles comme baromètres de l’activité, la croissance des productions d’acier et d’aluminium a été respectivement, de 1970 à 1974, de 20 p. 100 pour l’acier et de 31 p. 100 pour l’aluminium; elle est de 19 p. 100 pour l’acide sulfurique, de 107 p. 100 pour le caoutchouc synthétique, de 13 p. 100 pour le ciment. Le cas est presque général, à trois exceptions près. Pour certaines industries, la rupture de rythme s’est produite un peu plus tôt, dès la fin de 1973, comme pour la construction automobile, qui a connu une progression de 16 p. 100 de 1970 à 1973, montage non compris. Pour d’autres, elle s’est manifestée plus tard: ainsi, pour la construction navale, l’année 1975 demeure un record absolu du tonnage en construction, avec une progression de 61 p. 100 de 1970 à 1975. Le cas des industries textiles est particulier: elles continuent leur courbe descendante, amorcée bien avant 1970, surtout l’industrie cotonnière, pour laquelle la diminution de filés de coton atteint 4 p. 100 entre 1970 et 1974; c’est là un cas particulier dû à des modifications des habitudes de consommation, à la concurrence des fibres synthétiques et à celle de nouveaux pays producteurs à bas salaires.

La césure dans cette évolution vers la hausse rapide des productions industrielles mondiales se produit au milieu de la décennie de 1970. Elle a deux causes majeures: la crise pétrolière commencée à la fin de 1973 et l’aggravation, avant cette crise, de l’inflation dans le monde; celle-ci a, en effet, provoqué un tassement du pouvoir d’achat qui a directement atteint les industries de consommation, et une hausse des salaires qui a réduit les possibilités d’autofinancement des entreprises; le télescopage de la tendance inflationniste croissante et de la crise pétrolière, qui a elle-même ajouté quelques points au taux d’inflation, a créé un climat d’incertitude économique qui a cassé l’expansion industrielle mondiale en 1974-1975.

Le contraste avec l’évolution antérieure de l’industrie mondiale recouvre des situations différentes selon les industries et selon les groupes de pays.

Les effets malthusiens de la crise qui s’est ouverte au milieu de la décennie de 1970 n’affectent pas l’économie mondiale de la même manière dans les divers secteurs industriels. On peut distinguer, à cet égard, deux grands groupes.

Parmi les industries de base, les industries de biens d’équipement et celles de biens de consommation, beaucoup sont durement touchées et voient leur production en perte de vitesse. La sidérurgie mondiale, avec 619 millions de tonnes d’acier en 1982, reste à un niveau inférieur de plus de 10 p. 100 à celui de son année record, 1974. Même situation pour la construction automobile (montage non compris), avec 36 millions de véhicules en 1982. La construction navale subit, du fait de la contraction du commerce pétrolier, une chute encore plus grave, de plus de 50 p. 100 du tonnage de navires en construction par rapport à l’année record, 1975. Cette perte est comparable à celle des industries textiles: la production de filés de coton se situe à 45 p. 100 de son niveau de 1974.

Les autres industries ont moins sévèrement subi la crise, qui se traduit néanmoins par un fort ralentissement de leur progression antérieure; par exemple, de 1974 à 1982, 8 p. 100 seulement pour l’aluminium, contre 30 p. 100 de 1970 à 1974 (fig. 1), 8 p. 100 pour l’acide sulfurique, l’une des grandes productions chimiques de base (contre 19 p. 100), 12 p. 100 pour le caoutchouc synthétique (contre 107 p. 100). Seule exception, le rythme rapide de la croissance de l’industrie du ciment: 16 p. 100.

La sensibilité des pays industrialisés à la crise est toutefois différente, ainsi qu’on peut le déduire de la comparaison des indices de la production industrielle: la baisse des indices est sensible dans la plupart des pays ouest-européens (en France, entre autres) et aux États-Unis; leur évolution à la hausse est au moins modeste, sinon faible, au Japon et dans les pays communistes. Une exception toutefois: la hausse, tout en s’atténuant, reste considérable dans quelques nouveaux pays industriels d’Extrême-Orient, Corée du Sud et Taiwan (119 p. 100).

Les débuts de la décennie de 1980 marquent une nette reprise industrielle générale, qui va se confirmer dans les années suivantes. Le tassement de la crise pétrolière, la baisse des prix des sources d’énergie, la maîtrise et le recul de l’inflation, la reprise de l’investissement neuf pour équipement sont à l’origine de ce redressement dans le monde industrialisé; toutes les industries reprennent leur progression, parfois importante: celle-ci est de 19 p. 100 pour l’acier de 1982 à 1988, de 36 p. 100 pour l’aluminium, de 30 p. 100 pour la construction automobile, de 28 p. 100 pour le caoutchouc synthétique, de 26 p. 100 pour le ciment; même l’industrie cotonnière, qui avait été la victime la plus grave de la récession, affiche une remontée très nette (+ 24 p. 100 pour les filés de coton de 1982 à 1988).

La répartition de cette progression au sein des pays industrialisés reste inégale. Les uns, essentiellement en Europe occidentale, ont une progression industrielle encore lente, limitée entre 10 et 20 p. 100 au début de 1989 par rapport à l’indice général 100 de 1980 (118, par exemple, pour la France et les Pays-Bas, 117 pour la Grande-Bretagne, 111 pour la R.F.A). Les autres affichent des progrès plus substantiels: d’une part, l’Amérique du Nord (+ 30 p. 100 aux États-Unis de 1980 au début de 1989), le Japon (+ 30 p. 100); d’autre part, les pays communistes industrialisés (+ 34 p. 100 en U.R.S.S., + 28 p. 100 en Tchécoslovaquie). Quelques nouveaux pays industriels d’Extrême-Orient font exception par des progrès spectaculaires: Singapour (+ 70 p. 100), Taiwan (+ 174 p. 100), la Corée du Sud (+ 263 p. 100).

Les progrès de la productivité

La cassure qui s’est produite en 1974-1975 dans la courbe générale d’évolution de l’industrie mondiale contraste avec l’évolution de la productivité qui, elle, a persisté, à la fois parce qu’elle est nécessaire et que les progrès technologiques la rendent possible.

L’amélioration de la productivité par homme est d’abord indispensable, en particulier dans celles des industries qui incluent dans leurs prix de revient une forte pondération de charges salariales (salaires et charges sociales), et dans ceux des pays industrialisés qui pratiquent des salaires élevés et où le poids des charges sociales s’accroît: face aux pays du Tiers Monde, qui s’industrialisent et où l’industrie bénéficie de bas salaires et de charges sociales réduites, leur compétitivité commerciale serait anéantie sans hausse de la productivité, et cela d’autant plus rapidement que progresse la tendance au libre-échangisme mondial.

Au surplus, les progrès des techniques industrielles et un certain nombre d’innovations technologiques récentes rendent possible la progression de la productivité. C’est le cas de l’innovation que constitue en sidérurgie la coulée continue, qui permet de court-circuiter les stades de la coulée en lingots, du démoulage, du réchauffage en fours Pitts et du premier laminage dégrossisseur, donc de supprimer les postes de travail correspondants. Il en va de même pour la généralisation des machines à commande numérique dans l’industrie mécanique, des machines-transferts multipoints dans la construction automobile, des métiers à turbines dans la filature du coton. La généralisation des robots, aussi bien pour des opérations en chaîne naguère manuelles que pour le transfert des éléments à usiner ou à assembler d’un poste robotisé au suivant, constitue à elle seule une véritable révolution industrielle, notamment dans les industries mécaniques: un énorme gain de productivité, des ateliers au personnel très limité (dont les fonctions sont essentiellement de contrôle) et une modification des tâches industrielles au profit de spécialistes hautement qualifiés. L’accélération de vitesse des machines aboutit au même résultat, comme pour les machines à papier, qui fonctionnaient naguère à 200-250 mètres à la minute et dont les plus modernes produisent aujourd’hui près de 700 mètres à la minute, avec le même personnel. L’innovation du float-process dans l’industrie du verre et de la glace a de même amélioré, outre la qualité du produit, la productivité-homme. D’une manière plus générale, l’introduction récente de l’électronique et de l’informatique constitue un facteur décisif d’amélioration de la productivité.

Les gains annuels de la productivité dans l’industrie varient, certes, avec les types d’industries, et, suivant leurs capacités d’investissement, avec les pays: ils se situent dans la fourchette de 3 à 7-8 p. 100.

À cette notion de productivité-homme il convient d’ajouter celle, nouvelle, de productivité-énergie, imposée, depuis 1974, par les hausses importantes du coût de l’énergie: il s’agit, à égalité de nombre d’unités fabriquées, de consommer moins d’énergie, avec certes des techniques déjà connues de calorifugeage ou de finesse dans le réglage des sources de production thermique, mais aussi par la récupération d’énergies jusqu’alors perdues. Dans l’industrie chimique, par exemple, où l’on consomme beaucoup de vapeur, mais où l’on en produit dans des réactions exothermiques, le recyclage de la vapeur permet d’économiser des calories (et même, avec de la vapeur haute pression, de produire de l’électricité). De même trouvet-on depuis peu des usines à papier qui, récupérant la vapeur produite lors du séchage du ruban de papier dans la phase finale de la production, parviennent à produire elles-mêmes l’électricité qu’elles consomment.

Le problème de l’emploi

Les évolutions récentes – non parallèles – de la production et de la productivité impliquent une conséquence grave: le développement du chômage dans l’industrie des pays hautement industrialisés, et, par suite, dans les activités du secteur tertiaire dont le fonctionnement est lié à l’industrie. En effet, pour que l’amélioration, nécessaire, du taux de productivité ne suscite pas de chômage, il faudrait au moins que ce taux fût inférieur au taux de croissance de la production industrielle, compte tenu du surplus de main-d’œuvre jeune arrivant à l’âge du travail par rapport aux départs en retraite. Tel n’est plus le cas depuis 1974-1975.

Résultat: dans les dix-sept pays du monde les plus industrialisés – Europe de l’Ouest, Amérique du Nord, Japon et Australie –, le chômage, qui avait augmenté seulement de 8 p. 100 de 1970 à 1974, a connu depuis 1974 une progression très rapide de 183 p. 100 jusqu’au milieu de 1982 avec environ 26 millions de chômeurs, notamment aux États-Unis, en Grande-Bretagne, en Italie, en France et même en R.F.A. Le Japon lui-même a dépassé le cap du million de chômeurs et la R.F.A., celui des deux millions.

La reprise industrielle n’est pas suffisante depuis 1982, compte tenu des gains de productivité, pour diminuer le volume global du chômage dans les mêmes dix-sept pays, sauf aux États-Unis, au Canada et en Grande-Bretagne.

L’évolution récente des structures industrielles

Une triple tendance s’accuse fortement depuis deux décennies: concentration accrue, importance accrue de secteurs non industriels dans la gestion de l’industrie, généralisation de la multinationalisation de l’industrie.

La concentration technique en unités de production de taille importante s’explique et par l’avantage classique de la production de masse et par les progrès technologiques qui ont singulièrement augmenté les seuils d’optimum de capacité: l’optimum de capacité se situait en sidérurgie, en 1960, autour de 3 millions de tonnes de capacité d’acier par an et pour l’aluminium autour de 100 000 tonnes de métal. Il se situe maintenant entre 8 et 10 millions de tonnes pour l’acier, à plus de 250 000 tonnes pour l’aluminium: l’usine sidérurgique de Tarente a une capacité de 10 millions de tonnes, celle d’Usinor à Dunkerque, de 8 millions. L’usine d’aluminium de Flessingue, aux Pays-Bas, produit 170 000 tonnes de lingots, celle de Bellingham aux États-Unis, en produit 237 000 tonnes, et celle de Sakaide au Japon, 196 000 tonnes. Une usine moderne de carrosserie et de montage d’automobiles emploie maintenant de 12 000 à 13 000 personnes.

La concentration économico-financière en très grandes sociétés de production n’est pas un phénomène récent: elle s’était développée – sous des formes d’intégration verticale, d’intégration horizontale ou d’intégration globale – déjà avant la guerre, aux États-Unis et en Allemagne; elle s’y est renforcée depuis 1950 et s’est étendue au Japon dès les années 1950. Trois faits récents ont accusé cette tendance à la concentration:

– D’abord, la tendance à une forte concentration s’est accusée dans les grands pays qui l’avaient déjà adoptée: on ne citera qu’un exemple, la fusion de deux groupes sidérurgiques japonais de grande taille, Fuji Iron and Steel et Yawata Steel, qui ont créé la première société sidérurgique du monde.

– Deuxième fait: la généralisation de la concentration dans les pays d’Europe de l’Ouest, jusqu’alors assez timides dans ce domaine. L’aiguillon du Marché commun et la tendance accrue au libre-échangisme mondial, la nécessité du groupement des efforts financiers pour des investissements sans cesse croissants ont été les moteurs essentiels de cette évolution, qui a comporté des cascades de fusions ou d’absorptions: la Belgique, les Pays-Bas, l’Italie, la France en apportent de nombreux témoignages. L’exemple français est net: plus des neuf dixièmes de la production d’acier sont assurés par Sacilor et Usinor, plus des neuf dixièmes de la production de verre proviennent aussi de Saint-Gobain-Industries et B.S.N., plus de 98 p. 100 de la construction automobile sont produits par deux groupes, P.S.A. et Renault, sans oublier le cas limite d’Aluminium Pechiney, qui a le monopole du métal léger en France.

– Troisième fait: l’apparition et la généralisation d’un type nouveau de concentration, qu’on pourrait qualifier de latérale, et qu’on a nommé «conglomérat». Il consiste dans le groupement, autour d’une société industrielle, d’autres activités industrielles qui ne lui sont liées ni techniquement ni commercialement, ou même d’activités non industrielles (en particulier de distribution): le groupe verrier B.S.N. a ainsi absorbé des industries alimentaires (Gervais-Danone, Société européenne de brasseries). Ce phénomène est général dans l’industrie du monde non socialiste.

Cette diversification traduit deux soucis principaux: dans des économies où les mutations et les fluctuations sont rapides et graves, compenser, grâce à une intégration latérale, les pertes d’un secteur par des profits dans un autre et ménager une clientèle préférentielle par l’absorption de sociétés clientes du produit industriel principal.

Une autre évolution récente des structures industrielles peut paraître paradoxale: à mesure qu’elle gagne en puissance de production, la société industrielle court le risque de perdre son indépendance de gestion et de tomber sous la direction de secteurs non industriels. Le cas japonais depuis la guerre avait montré, après l’éviction des anciennes familles de zaibatsus, la prépondérance croissante des banques de zaibatsus dans leur gestion. Cette évolution, d’abord limitée au Japon, pour une plus faible part aux États-Unis et à la R.F.A., s’est récemment étendue à l’ensemble des grands pays industriels du monde capitaliste. La lourdeur croissante de l’investissement en rend compte.

D’une part, pour couvrir leurs besoins financiers, les sociétés ont dû souvent faire appel aux prêts bancaires; progressivement, l’appui financier des banques a dérivé vers des prises de participation, tantôt minoritaires, avec minorité de blocage, tantôt majoritaires. D’autre part, l’appel aux prêts de l’État a parfois abouti à un surendettement tel que l’État s’est trouvé, même sans volonté politique de nationalisation, conduit à transformer ses créances en participations financières. L’État, de son côté, s’est vu contraint, surtout depuis la crise récente, à éviter la cessation d’activité de sociétés importantes et à y prendre des participations: c’est, par exemple, le rôle de l’I.D.I. (Institut de développement industriel) en France, de l’I.R.C. (Industrial Reorganization Corporation) en Grande-Bretagne. Enfin, dans le cas d’industries de pointe, comme l’informatique, astreintes à des recherches longues et coûteuses, sans rentabilité rapide certaine, l’État, pour assurer le développement d’un secteur jugé indispensable au pays, a dû participer à la création de sociétés mixtes.

Dès lors ce sont les banques, actionnaires principaux, l’État ou des organismes para-étatiques financés par l’État qui prennent la direction de sociétés industrielles, parfois de branches industrielles entières. Un exemple en a été donné par la restructuration de la sidérurgie française en 1978: les sociétés financières qui détenaient depuis 1978 la majorité du capital d’Usinor et de Sacilor étaient elles-mêmes détenues à 30 p. 100 par des banques et à 55 p. 100 par l’État ou par des organismes financiers étatiques. Les nationalisations de 1982 ont consacré le contrôle unique par l’État des quatre cinquièmes de la sidérurgie en France. La mutation de la grande industrie tend à déboucher sur la perte de son autonomie.

La projection internationale des grandes sociétés industrielles, inaugurée il y a plusieurs décennies par le secteur pétrolier aux États-Unis et en Grande-Bretagne, s’est singulièrement amplifiée depuis vingt ans. Elle concerne des branches industrielles de plus en plus nombreuses, et non plus seulement les sociétés américaines, mais aussi de nombreuses sociétés européennes et japonaises. L’aluminium, l’automobile, la mécanique, la chimie, l’informatique, les grandes industries de matériel électrique, mais aussi les industries du verre et du ciment, les industries agro-alimentaires sont les secteurs privilégiés de cette internationalisation industrielle, qui a de multiples causes.

Comme par le passé, mais plus que par le passé, la recherche des principales matières demeure une raison, dont le rôle croît avec l’épuisement des matières premières nationales. De plus en plus, il s’y ajoute une préoccupation commerciale: la présence sur des marchés nationaux importants par leurs besoins d’équipement et leurs niveaux de consommation. En outre, dans certains pays où les conditions du développement industriel sont devenues moins favorables, les sociétés industrielles tendent de plus en plus à créer des filiales étrangères dont les bénéfices peuvent compenser la précarité des résultats financiers des sociétés mères: des sociétés françaises comme Lafarge, Saint-Gobain ou Pechiney effectuent ainsi dans nombre de pays étrangers la moitié, voire davantage, de leur chiffre d’affaires consolidé. Les décennies de 1970 et 1980 ont vu ainsi se développer fortement l’expansion des multinationales.

L’évolution géographique de l’industrie mondiale

Deux traits caractérisent l’évolution géographique de l’industrie: son expansion dans le monde et la recherche de la localisation préférentielle sur les ports maritimes.

L’expansion spatiale

Le temps n’est plus où l’Europe, U.R.S.S. incluse, l’Amérique du Nord et le Japon avaient le monopole de l’industrie mondiale: plus de 41 pays produisent de l’acier dans le monde, 42 de l’aluminium; dans l’industrie automobile, on construit des voitures dans 24 pays, mais on en monte avec les éléments fournis par les pays constructeurs dans 21 autres pays; l’industrie cotonnière existe maintenant dans 36 pays et sur tous les continents.

Le privilège des vieux pays industrialisés n’est toutefois encore que peu entamé (cf. cartes): ils produisent encore les quatre cinquièmes des produits métallurgiques de base, les neuf dixièmes des voitures automobiles neuves. La percée industrielle des pays neufs ou sous-développés n’est encore pleinement sensible que dans des industries qui incluent un fort pourcentage de charges de main-d’œuvre et sont susceptibles de se développer sans investissements de très grande ampleur. L’industrie textile, spécialement celle du coton, tout récemment l’industrie des composants électroniques se sont fortement développées dans ces pays, beaucoup moins les métallurgies de base, la mécanique et l’électromécanique, qui requièrent de considérables investissements. Le redéploiement spatial de l’industrie mondiale reste, pour le proche avenir, difficile à réaliser.

La révolution dans les localisations industrielles

Jusqu’au milieu du XXe siècle au moins, les localisations industrielles dépendaient, pour beaucoup, de facteurs physiques de caractère impératif, tels que l’extraction de la houille, la production d’hydroélectricité, celle de matières premières minérales ou salines. Au surplus, ces localisations résultaient du libre choix de l’industriel; elles étaient spontanées. D’autres implantations étaient appelées par les foyers humains, centres de main-d’œuvre et de consommation.

Deux faits dominants marquent les implantations industrielles depuis deux décennies. D’abord, les anciens facteurs physiques de localisation industrielle perdant de l’importance, l’industrie recherche par priorité les ports maritimes. Les raisons en sont claires: face à l’épuisement des ressources nationales du sous-sol, le port d’importation tient lieu de mine, avantagé par le moyen de transport bénéficiant du plus bas taux de fret. L’industrie dispose en outre dans un port des moyens d’expédition de ses produits et de toute l’infrastructure de services du port; elle peut enfin trouver dans le port lui-même une partie de sa propre clientèle. De là les complexes qui se sont développés à Rotterdam, au Havre, à Fos-Marseille. Notons toutefois que tous les ports n’appellent pas également cette industrialisation croissante. L’élévation du tonnage des navires de charge, notamment des minéraliers, le développement des trafics rapides de produits finis en conteneurs ou en roll on-roll off limitent de plus en plus la grande industrialisation portuaire aux ports de rivage en eau très profonde, et déphasent les ports de fonds d’estuaire aux profondeurs moins fortes et au trafic plus lent.

De plus, les localisations industrielles ne sont plus spontanées comme naguère. Le souci d’utiliser le mieux possible les surfaces disponibles, celui de protéger l’environnement contre les nuisances industrielles, celui de coordonner et de canaliser l’expansion de l’industrie ont conduit, dans de nombreux pays, à des politiques d’aménagement du territoire qui délimitent des zones de développement: une panoplie d’incitations, surtout financières et fiscales, jointe à des interdits ou des pénalités dans certaines zones, est destinée à favoriser le développement industriel de ces aires de développement, dont la plupart concernent de grands ports.

Encyclopédie Universelle. 2012.

Игры ⚽ Поможем сделать НИР

Regardez d'autres dictionnaires:

  • INDUSTRIE - Les relations industrielles — L’action des syndicats peut se situer à trois niveaux: défense des salariés au travail et lutte pour l’amélioration de leurs conditions de travail et de rémunération; à l’autre extrémité, action collective pour la transformation du mode de… …   Encyclopédie Universelle

  • Industrie De Type Process — Une industrie de type process est une industrie dans laquelle les matières premières subissent une transformation chimique en plus d une transformation physique propre au procédé industriel. Les grandes industries process sont les industries agro …   Wikipédia en Français

  • industrie — (in du strie) s. f. 1°   Habileté à faire quelque chose, à exécuter un travail manuel. Cela est fait avec beaucoup d industrie. Avoir de l industrie. Une dangereuse industrie. •   Quelque industrie qui paraisse dans ce que font les animaux,… …   Dictionnaire de la Langue Française d'Émile Littré

  • Industrie de type process — Une industrie de type process est une industrie dans laquelle les matières premières subissent une transformation chimique en plus d une transformation physique propre au procédé industriel. Les grandes industries process sont l industrie… …   Wikipédia en Français

  • INDUSTRIE - Industrialisation et formes de société — La prépondérance de l’industrie sur les formes traditionnelles de l’activité économique (agriculture et artisanat) apparaît avec la révolution industrielle, au cours de la seconde moitié du XVIIIe siècle en Angleterre et de la première moitié du… …   Encyclopédie Universelle

  • INDUSTRIE - Groupes industriels et financiers — Dans l’univers économique, divers types de centres de décision coexistent et remplissent dans les relations de production et d’échange des rôles distincts: l’établissement ou unité locale, centre élémentaire de gestion, est intéressant ici… …   Encyclopédie Universelle

  • INDUSTRIE - La civilisation industrielle — L’expression «civilisation industrielle» est d’un emploi récent. Pour préciser le sens employé ici, et l’importance que ce concept pourrait prendre dans l’avenir, un aperçu historique s’impose concernant l’origine et l’évolution des deux termes… …   Encyclopédie Universelle

  • Industrie Minière En Iran — L industrie minière de l Iran est très peu développée. La production de ce secteur contribue seulement à 0,6 % du PIB du pays. Si l on ajoute d autres industries d extractions connexes, ce pourcentage atteint 4 %. Beaucoup de facteurs… …   Wikipédia en Français

  • Industrie miniere en Iran — Industrie minière en Iran L industrie minière de l Iran est très peu développée. La production de ce secteur contribue seulement à 0,6 % du PIB du pays. Si l on ajoute d autres industries d extractions connexes, ce pourcentage atteint… …   Wikipédia en Français

  • Industrie minière en iran — L industrie minière de l Iran est très peu développée. La production de ce secteur contribue seulement à 0,6 % du PIB du pays. Si l on ajoute d autres industries d extractions connexes, ce pourcentage atteint 4 %. Beaucoup de facteurs… …   Wikipédia en Français

Share the article and excerpts

Direct link
Do a right-click on the link above
and select “Copy Link”